lundi 22 juin 2009

Ce qui s'est passé avec le "USS Liberty"

Et bien moi je relève le défi sur une année charnière au Moyen Orient, 1967, année curieusement absente de vos pérégrinations historiques. Que s'est-il passé exactement en 1967 avec l'affaire du « USS Liberty » d'après vous ? Je rappelle pour ceux qui ne le sauraient pas, qu'un navire US a été violemment attaqué par des avions et vedettes israeliennes…pour en arriver à un soutien inconditionnel des US à Israel (ce qui n'était pas le cas jusque là).

Le coup de poker de Moshe Dayan est le suivant. Que s'est il passé exactement ? Pour le détail de l'opération militaire, il suffit de rechercher les témoignages US qui, age de la retraite aidant, sont moins verrouillés aujourd'hui qu'hier. En gros, l'attaque par les Israéliens, en toute connaissance de cause, de ce navire espion US au large de ses eaux territoriales mais séparé de la flotte de guerre américaine bien plus au large, alors que la victoire d'Israël était déjà assurée sur le terrain, mais au moment aussi ou les Américains, plutôt neutres jusque là, sous pression russe et embourbés jusqu'au cou au Vietnam, envisageaient de mettre un coup de frein aux appétits expansionnistes d'Israël, alors en pleine action.

Pourquoi Johnson a-t-il fait directement rappeler les avions US partis a la rescousse du USS Liberty sous le feu des Israéliens ? Pourquoi a-t-il laissé mourir ses marins (plusieurs dizaines de victimes) ?

La réponse claire et nette a cette question est celle d'imaginer les titres des News si c'eut été le cas : « WAR » ou autre « US DOWNS ISRAELI PLANES » a la une, pleine page, lettres grasses, suivis d'éditoriaux enflammés sur le bellicisme voire l'antisémitisme de Johnson et de son administration. Ceux-ci agrémentés par de profondes analyses sur la Shoah qui recommence après 25 ans d'interruption, les affinités particulières des US pour le pétrole arabe en parallèle aux commentaires en direct de survivants d'Auschwitz. C'est exactement cet impact médiatique qu'a utilisé Moshe Dayan dans l'évaluation de son rapport de force avec la maison blanche pour forcer un soutien US définitif et inconditionnel, c'est ce qui fait de lui non seulement un grand général mais aussi un homme politique de génie. Il serait complètement simpliste d'y voir là une quelconque mainmise de la presse par le soi-disant lobby, c'est d'un jeu de haute politique dont il est ici question, et le lobby n'est qu'un vecteur dans le jeu de l'échange. Que les Etats-Unis d'Amérique et son président d'alors n'en sortent pas grandis n'est qu'un verrou supplémentaire dans le refoulement général.

Ceci ne regarde que les Américains et les Israéliens me direz vous. Pas tout a fait. Car cela se passait en pleine guerre, deux superpuissances nucléaires étaient opposées l'une à l'autre par belligérants interposés, et rien ne dit qu'un message de secours erroné dans le feu de l'action n'ait pu déclencher la catastrophe globale. Heureusement semble-t-il, les antennes de la CIA à Beyrouth avaient pu enregistrer les messages des pilotes Israéliens que le bateau en détresse ne pouvait plus retransmettre. Mais qu'on ne vienne pas me dire que Moshe Dayan – et ceux qui en ont pris la décision avec lui – n'ont pas joué avec le sort de la planète en poussant le jeu de la Realpolitik a ses extrêmes limites. Mes soucis a propos de Dimona, autre sournoiserie, ont pour fondement ce genre de perspective que les bruits de bottes autour de l'Iran ne font qu'amplifier…

Je préciserai quand même que je soutiens la pérennité de deux états viables dans la région (et sans retour). Si j'ai posté ce qui est ci-dessus qui est un visage pas vraiment réjouissant de l'indéfectible allié des US au proche orient, cela m'aide à me démarquer de votre manichéisme un peu trop simpliste ou les bons sont toujours du même coté.

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